Dis-moi, Voisin…
(Bob, huit ans, s’adresse à un étranger, venu travailler en France.)
- « Dis-moi, Voisin, tu sais bien que je ne peux pas dire ton nom : je t’appellerai encore Voisin.
- (silence)
- Dis-moi, on discutait bien tous les deux « avant », mais depuis que tu es revenu de l’hôpital, tu rentres vite dans ton couloir quand je viens à la barrière ; … pourquoi ?
- (geste d’impuissance)
- Je sais que tu as été bien soigné…. et tu te caches comme un oiseau blessé.
- (écrivant) JE PEUX PAS PARLER. J’ECRIS MAL FRANÇAIS
- Dis-moi : si tu essayais de me parler comme si tu étais au bout du jardin… pas vite… peut-être que je comprendrais ?
- (par écrit) PAS COURAGE
- Essaie… pour voir.
- (en chuchotant) Merci-de-venir-ici.
- J’ai compris, la la lère, tu vois bien que tu as gagné !
- (par écrit) OUI… MAIS LES AUTRES
- C’est pareil : s’ils sont sympa, ils te regarderont pour te comprendre, mais toi, tu dois continuer à parler comme la Télé, quand le son est coupé, en t’appliquant.
(Deux mois après)
- Dis-moi, Voisin, est-ce que les prunes sont mûres ?
- (en voix chuchotée) Viens goûter et… lis la lettre que je reçois.
- (après un silence pendant qu’il lit) Tu vas partir apprendre à parler autrement… Super ! Bientôt, je te dirai « Dis-moi, Voisin ! »… et tu me répondras !
La laryngectomie vue par un enfant, 2004
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